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Jouer
en Ehpad

La situation en EHPAD a connu des mises en lumière ces derniers temps, qui ont révélé une carence en soin, un accroissement du besoin de recréer du sens et du commun dans ces lieux de fin de vie. La crise sanitaire de 2020 a mis l’accent sur  l’isolement des personnes et l’âpreté de la situation des soignants qui s’en occupent.

Au sein des établissements de soin, la compagnie restaure avec le théâtre le lien avec l’extérieur de l’établissement en amenant des formes théâtrales pensées pour ces espaces. Nous travaillons aussi à restaurer un lien entre les personnes résidentes et avec les soignants pour refaire de ces lieux de soins, des lieux de vie.


1ère séance
dans un Ehpad où sont réunis une vingtaine de résidents. Personne ne se parle, les participants ne connaissent pas les noms des autres, certains refusent d’être assis près de certains d’autres. On s’accroche, pendant 10 séances, on joue, on danse, on fait de la musique avec eux. 

Séance 10 :

J’ai toujours rêvé d’être une princesse”, nous avoue une résidente en pleurs alors que nous rangeons nos affaires à la fin d’une séance, inconsolable de ne pas avoir osé demander à jouer la reine qui se fait couronner. Ni une, ni deux, tandis que nous ressortons robes et couronnes, les résidents reviennent, la console, se remettent en jeu. Et nous la couronnons.

Qu’il est beau son visage, qui porte d’un coup tous ses âges, à la fois vieille dame et petite fille qui réalise enfin son rêve. Et puis, une autre résidente lui prend la main et nous dit “grâce au théâtre, j’ai trouvé une amie pour la vie”. Et les voilà qui se lèvent, main dans la main, sourire au lèvres, pour remonter le couloir qui mènent jusqu’aux chambres. Nous restons là longtemps, béats,  les costumes à la main, à regarder leurs dos complices s’éloigner.


Nous réunissons au début de leur vie des tous petits ensemble, puis à la fin de leur vie des très vieux ensemble. Rassemblés de façon fonctionnelle pour que l’on puisse leur prodiguer les soins dont ils ont besoin. Autant à 2 ans la question du vivre ensemble ne se pose pas vraiment autant à 80 ans, la réponse est complexe. Comment rassembler des gens qui n’ont rien d’autre en commun que leur classe d’âge? Voire des gens qui ont 30 ans d’écart, on peut entrer à 70 et fréquenter des gens de 100 ans; toute une génération d’écart et on considère qu’ils appartiennent généralement à la même classe de vieux. Mais il n’y a pas une seule musique qu’ils ont en commun. Comment se crée une communauté ?

L’atelier proposé s’adresse à tous les volontaires sans limitation de places, il peut y avoir jusqu’à 30 participants, tant l’engouement pour l’activité est grand.  Les  participants sont  installés en cercle et investissent différentes propositions artistiques: sensibilisation aux percussions, travail sur le mouvement dansé, construction d’histoires par associations d’idées et enfin improvisation théâtrale. 

Ces ateliers sur un temps long de 10 séances de 2h30, permettent aux résidents de se découvrir entre eux. Parfois les classes d’âges sont très éloignées, il peut y avoir jusqu’à une génération d’écart. Au fil des séances, les regards changent, ceux qu’ils portent les uns sur les autres et ceux qu’ils portent sur eux-mêmes. Chanter, battre un rythme à l’unisson, improviser, rire ensemble…  La pratique permet de tisser des liens, de faire des choses dont ils ne se sentaient plus capables, de (re)trouver du plaisir à être ensemble 

Ce changement de regard s’opère aussi entre les résidents et les soignants. Quand d’un seul coup, un participant retrouve le sourire, la mobilité, l’envie de faire, parfois même la parole perdue, les soignants ne voient plus que des “résidents” mais les personnes. Quand un.e soignant participe à l’atelier, rit avec eux, joue avec eux, ils ne sont plus que des blouses roses mais des complices. L’impact sur la vie au sein de l’Ehpad est vite constaté par chacun, que ce soit au niveau du vivre ensemble, de l’état de santé mentale des résidents et de la récupération progressive de capacités cognitives, tant au niveau de la mémoire, que des mouvements, que de la motivation retrouvée de prendre part à la vie.


La compagnie a créé le spectacle King Lear Syndrome ou les Mal-élevés pour mettre en lumière la situation de vie en Ehpad à travers l’adaptation du Roi Lear.  Dans chaque théâtre / ville où nous jouons nous recrutons 5 volontaires amateur.trices séniors qui intègrent le spectacle.  Ils sont ainsi remis au centre de tous les regards et partagent avec leur familles et amis venus les applaudir,  une expérience très éloignée de leur vie ordinaire. Nous retournons ensuite en Ehpad avec une version adapté du spectacle pour aller vers ceux qui ne peuvent pas se déplacer et encore moins en soirée pour profiter d’une représentation.

Plus axée sur la musique et la chanson, cette forme permet aux résidents de découvrir  l’univers et les costumes du Roi Lear, tandis qu’ils sont invités à improviser avec les professionnels sur certaines scènes.

Et peu à peu, l’Ehpad devient un lieu où l’imaginaire et le plaisir sont possible.


Forte de son expertise au sein des Ehpad, la compagnie a imaginé une performance, L’EHPAD DE DEMAIN qui s’adresse aux dirigeants et aux financeurs des EHPAD. L’intention de cette performance est d’ouvrir leur imaginaire sur ces lieux de soins. 

Depuis 2021, la compagnie a déjà organisé 5 performances de ce type, qui ont pour but de “réveiller” le regard sur une problématique et de mettre en jeu un aspect sociétal  de façon  artistique, toujours dans le champ du CARE. Il s’agit lors d’un colloque ou de journées de réflexions par exemple, de venir alimenter le débat par notre expertise à la marge. En effet nous avons un autre regard sur les bénéficiaires et le fonctionnement des établissements.  Lors de la performance nous montrons des images et des vidéos des ateliers afin de rendre sensible aux directeurs et financeurs l’apport concret dans la vie des participants et l’impact de ces actions. 

Nous souhaitons ainsi créer un territoire commun  où l’on raconte et expose les révélations que nous avons lors des ateliers. En tant que dirigeants ou financeurs, ils n’ont pas accès à la partie en “santé” des bénéficiaires.  Les résidents sont souvent pour eux définis par leur vulnérabilité et leur dépendance, ils sont accoutumés à trouver des solutions à leurs problèmes. Nous les invitons à retrouver de l’émotion et de l’étonnement pour une humanité qu’ils ont l’habitude de prendre en charge.


En menant des actions en Ehpad, nous avons constaté la vitalité,  la santé, et l’humour des résidents. Nous avons écouté leurs histoires que plus personne n’écoute. Nous souhaitons les “sortir” de l’Ehpad et leur redonner une place dans la société, changer les regards souvent posés sur eux, qui cantonnent leur identité à celles de personnes “dépendantes”, “à charge”. 

° EXPOSITION « CETTE FURIEUSE ENVIE DE VIVRE »
Nous avons imaginé avec la photographe professionnelle Clara Chichi un travail photographique mené auprès des résidents de  l’EHPAD Casanova de Saint-Denis et imaginé une exposition itinérante, créée à l’occasion de la création du spectacle en 2021 au Théâtre Gérard Philipe. Elle permet aux spectateurs de regarder les séniors autrement, de rappeler leur présence.

° DOCUMENTAIRE « LES AMATEURS SÉNIORS DE KING LEAR »
Franck Guillemain, réalisateur de documentaires, a suivi les amateurs séniors qui ont joué dans le spectacle King Lear Syndrôme lors de la création au Théâtre Gérard Philipe. Entièrement centré sur les coulisses du spectacle, le film suit les répétitions, les conversations, l’écoute du spectacle hors plateau, il est tout entier consacré à  faire ressortir la vitalité de personnages que l’on n’a plus l’habitude de regarder dans le contexte social. Il s’agit aujourd’hui d’en assurer  la distribution et la diffusion auprès des relais (chaînes de TV, salles de projection) afin d’élargir l’audience que nous touchons sur le sujet. 

Équipe

Ateliers au long cours
Antony Cochin, Marie Cocito, David Seigneur
et Elsa Granat
Ateliers-Concerts
Laurent Huon, Elsa Granat, Clara Guipont
Photos  ©Jessica Pinhomme – 5ème Saison
Photos de l’exposition
« Cette furieuse envie de vivre » 
©Clara Chichin

Partenaires

Le projet peut être mené grâce au soutien de la Conférence des Financeurs du Département du Val-de-Marne et du Théâtre Gérard Philipe.

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